Sommaire des principales leçons tirées de Nourrir la santé jusqu’à maintenant

L’équipe de personnel, d’entrepreneurs et entrepreneuses, de conseillers et conseillères, et d’innovateurs et innovatrices du programme Nourrir la santé a passé les trois dernières années à l’intersection des domaines de l’alimentation et des soins de santé. Ce faisant, elle a beaucoup appris. Voici cinq grandes leçons qui sont ressorties d’un processus de réflexion et d’évaluation. 

*Le rapport d’évaluation développementale de Nourrir la santé devrait être publié sous peu si vous souhaitez prendre connaissance d’une évaluation plus approfondie du programme.

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1. Il est indispensable de changer les services alimentaires de chaque établissement de soins de santé, mais cela ne suffit pas à atteindre l’objectif voulant que l’alimentation soit perçue comme fondamentale à la santé, à la fois des gens et de la planète.

Lorsque nous avons formé la cohorte d’innovateurs et d’innovatrices, nous pensions que les personnes qui prennent les décisions concernant l’alimentation dans les soins de santé (gestionnaires de services alimentaires, nutritionnistes, gestionnaires de l’approvisionnement) représentaient un potentiel inexploité pour changer les menus, l’approvisionnement et la programmation alimentaire. En apprenant de leurs pairs, en faisant mieux connaître leurs travaux et en augmentant la légitimité de ceux-ci, ces personnes pouvaient diriger ou apporter des changements importants au sein de leur établissement. Ce faisant, elles pouvaient commencer à encourager des changements commerciaux dans le système alimentaire et des changements de paradigmes au sujet de l’alimentation dans les soins de santé.

Au cours des deux dernières années, les 26 innovateurs et innovatrices, ainsi que leurs établissements respectifs ont amélioré l’accès à de la nourriture saine, savoureuse, locale, durable et culturellement appropriée. Ils ont réduit le gaspillage et augmenté le taux de satisfaction des patients et patientes en adoptant des modèles de « service aux chambres », en augmentant la présence autochtone grâce aux aînés et à un engagement communautaire, en mettant plus d’aliments traditionnels au menu et en achetant plus d’aliments locaux, notamment grâce à des contrats d’achat à terme avec des producteurs communautaires. Lors du symposium L’alimentation au service des soins de santé, les innovateurs et innovatrices ont présenté leurs travaux et se sont dit prêts et prêtes à poursuivre ces derniers au moment d’assumer des rôles de leadership plus importants.

De manière plus vaste, l’alimentation occupe une plus grande place à l’ordre du jour des établissements de soins de santé qu’il y a quelques années. Le directeur de la durabilité d’une grande entreprise de services alimentaires a affirmé recevoir de trois à quatre fois plus de demandes pour des études initiales sur l’alimentation locale qu’il y a trois ans, surtout dans les communautés où travaillent des innovateurs et innovatrices Nourrir la santé. L’alimentation est aussi désormais incluse dans les plans stratégiques d’un plus grand nombre d’établissements en tant qu’indicateur de rendement clé (IRC) et d’outil pour mesurer la satisfaction des patients et patientes. Ces derniers disent que la nourriture est importante et les hôpitaux commencent à réfléchir sérieusement aux liens que celle-ci entretient avec la guérison et le bien-être. 

Cependant, ces changements positifs ne sont pas encore systémiques, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas encore un impact d’envergure sur les mentalités, les politiques et les pratiques. Nous pensons que ces travaux doivent passer au niveau supérieur et être :

  • à l’ordre du jour des présidents et présidentes, cadres supérieurs et médecins, et intégrés aux pratiques et politiques institutionnelles;

  • appuyés par des normes, politiques et règlements fédéraux, provinciaux et territoriaux;

  • soutenus par des communautés locales, des patients et patientes et des aînés et aînées;

  • ancrés dans un répertoire vivant d’outils, de ressources, de récits et de preuves à propos de ce qui fonctionne et de ce qui ne fonctionne pas, afin d’éclairer une adoption de grande envergure.

Pour être efficace, c travail devra bénéficier d’un soutien considérable en matière de communication. Les communications du programme Nourrir la santé se sont avérées fascinantes. Bien qu’elles se soient avant tout concentrées sur la diffusion des travaux faits par la cohorte, elles ont eu une portée accrue grâce à d’autres voies. 

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2. L’apprentissage expérientiel et les relations humaines sont des outils puissants.

Les approches systémiques nous ont montré que bâtir des relations et examiner nos mentalités sont des choses tout aussi importantes que les règles, les règlements, les structures de pouvoir et les flux de ressources. L’apprentissage est relationnel : des relations authentiques et profondes peuvent nous transformer. L’apprentissage expérientiel avec des pairs, comme les collaborations sur des projets, les visites dans des fermes ou des communautés, ou les échanges avec des gens qui cultivent de la nourriture ou vivent de l’insécurité alimentaire, a le pouvoir de changer notre façon de penser. La cohorte d’innovateurs et d’innovatrices de Nourrir la santé a adopté une approche axée sur le mentorat et la collaboration entre pairs. Il importe de maintenir celle-ci durant la prochaine phase des travaux pour ancrer le changement à la fois dans les cultures personnelles et institutionnelles.

3. Un changement systémique exige des infrastructures, de la coordination et de la gestion pour que les dirigeants et dirigeantes du changement aient le temps et les ressources financières pour exécuter leur travail. 

Les projets collaboratifs de Nourrir la santé ont été conçus et mis sur pied par des innovateurs et des innovatrices autour de thèmes qu’ils avaient déterminés comme cruciaux pour faire progresser l’alimentation sur le plan de la santé et de la guérison. Ces thèmes étaient les suivants : Une politique alimentaire au profit de la santé, Des menus durables, Les habitudes alimentaires autochtones, Mesurer l’expérience alimentaire des patients et patientes, et Un approvisionnement axé sur des valeurs. Ces travaux ont été alimentés par les ambitions et l’énergie d’innovateurs et innovatrices, et de conseillers et conseillères. Ils ont aussi souvent attiré des partenaires externes qui ont choisi de travailler gratuitement pour faire de la recherche ou offrir des conseils juridiques. Le changement a toutefois été lent et difficile, en partie parce qu’il était fait sur le coin du bureau des innovateurs et innovatrices. Ces projets se voulaient ambitieux et les travaux se poursuivent, malgré des contraintes de temps et d’attention. À l’avenir, il importera toutefois d’inclure des fonds suffisants pour assurer une coordination, ainsi que détachements ou des boursiers ou boursières qui pourront soutenir les innovateurs et innovatrices au sein du système.

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4. Nous devrons concentrer davantage nos efforts pour apporter un changement d’envergure. Nous devons « planter notre drapeau » relativement à des questions précises maintenant que nous jouissons d’une certaine crédibilité.

À la phase initiale, il était efficace de réagir aux besoins des organismes pour obtenir un engagement et bâtir la crédibilité de Nourrir la santé. Il était logique de soutenir une vaste gamme d’idées et d’approches pour avoir un aperçu du terrain et comprendre ce qui était possible. Nous devons désormais concentrer nos efforts sur les idées les plus prometteuses et diriger notre énergie vers des leviers stratégiques menant aux questions plus vastes et fondamentales que sont la sécurité alimentaire et les changements climatiques.

5. Nous devons tenir compte des systèmes dans lesquels les services alimentaires sont enracinés et le contexte des services de santé provinciaux/territoriaux pour cerner les leviers qui pourront mener à un changement sur le plan des politiques.

Ce sont surtout les pratiques (comme l’établissement des menus) et les infrastructures (comme les activités des services alimentaires et les systèmes de distribution alimentaire) qui influent sur l’alimentation dans les soins actifs, et non les politiques. Des travaux visant à changer les politiques pourraient par conséquent avoir des répercussions importantes. Créer des occasions d’apprentissage entre pairs pour les décideurs, comme l’atelier qui a été organisé en septembre 2018 sur une politique alimentaire au profit de la santé pour les gouvernements provinciaux, territoriaux et autochtones, représente une stratégie prometteuse pour favoriser un changement novateur et ainsi accorder un rôle plus central à l’alimentation dans les soins de santé.

De plus, l’équipe de Nourrir la santé a observé plusieurs tendances de restructuration durant la courte vie du programme. Plusieurs autorités provinciales en matière de santé ont notamment été créées après la fusion d’autorités régionales (en Nouvelle-Écosse, au Manitoba et en Saskatchewan), ce qui a donné lieu à une prise de décisions de nature plus descendante et la consolidation des achats alimentaires. Il faudra donc tenir compte de nouveaux défis et possibilités au moment d’élaborer de nouvelles stratégies. La présentation récente du recensement des politiques et l’organisation d’un deuxième atelier à l’intention des décideurs prévu pour septembre 2019 aideront à brosser un portrait qui permettra de mieux cerner les leviers et les régions offrant un potentiel de changement élevé en matière de politiques. Par exemple, la Colombie-Britannique possède des cibles et des mesures de suivi d’approvisionnement local pour les hôpitaux, tandis que l’Ontario, Terre-Neuve et Labrador et le Québec étudient aussi des leviers d’approvisionnement pour appuyer la croissance du secteur agricole.  

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